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24 juillet 2008

LE P.S. ET LES FRANçAIS

(Tribune Libre)

Au lendemain d’un vote du Congrès sur la Constitution au cours duquel le “oui” ne l’a emporté que de si peu, les socialistes réalisent qu’il s’en est fallu de presque rien pour la victoire d’un “non” qu’ils appelaient de leurs vœux. D’ailleurs pour de bien obscures raisons.

Cette très relative défaite leur laisse aujourd’hui un goût amer. Mais, aussitôt, voici qu’ils nous livrent de nouveau un de ces spectacles dont ils ont seuls le secret : celui de désigner un bouc émissaire pour expliquer cette nouvelle déconvenue. Et c’est l’ineffable Jack Lang qui trinque ! Inénarrable !

Que se passe-t-il donc au P.S. ?

Certains affirment que ce parti n’a plus d’idées, qu’il n’aurait plus rien à proposer aux français. Peut-être. D’autres avancent que le P.S. n’a plus de leader et que c’est désormais la débandade générale : il est vrai que le P.S. - qui est pourtant un parti hyper-démocratique - n’a jamais si bien fonctionné que quand il avait un leader qui savait le rassembler : Jaurès, Blum, Mitterrand. Depuis, c’est plutôt le vide. Ou peut-être aussi le trop plein : il y a aujourd’hui cinq, six, voire sept leaders potentiels, tous très dispersés les uns des autres. (On est tout-à-fait à l’opposé de l’UMP où on ignore cette pratique de la démocratie). Et, pour désigner un leader lors du congrès de Reims, on a déposé pas moins de près d’une trentaine de motions : bon courage pour la synthèse de tant de courants aussi nombreux que diversifiés. Un remake du duel Royal - Strauss Kahn - Fabius d’avant la présidentielle qui n’a fait qu’aboutir à la cacophonie des messages qui s’entrecroisaient ensuite sans jamais se rencontrer. Le P.S. ne sait que trop le résultat où cela l’a conduit.

Il faut donc qu’il se trouve un homme (ou une femme) capable de dominer toutes ces factions. Cette attente est devenue aujourd’hui essentielle et n’est pas sans susciter quelques nervosités ici ou là. Mais nul ne voit pourtant un tel "leader suprême” à l’horizon de ce congrès : il est à craindre, pour les socialistes, que le voyage de Reims n’aboutisse à rien du tout. Ce d’autant que ce congrès est trop loin de toute échéance électorale : on observe que c’est toujours "à chaud" que surgissent les vrais leaders. Faute donc d’échéance, le P.S. ne pourra, après Reims, incarner d'opposition lisible. Il n’aura donc toujours rien à proposer aux français, pas plus une rupture claire avec Besancenot, qu’une alliance compliquée avec le centre, ou encore une troisième voie sur le modèle de la sociale démocratie anglaise.

Au-delà de ces stratégies, au-delà de cette absence de leader, il y a aussi une question de fond (et pas seulement programmatique). Il y a cette impasse faite par le P.S. sur la question sociale : le pouvoir d’achat, le rapport avec les syndicats, la démocratie sociale, toutes les mesures qui relèvent de la société civile, ceux qui peinent à boucler leurs fins de mois, etc.... Impasse, je dis, parce que la droite ne s’est jamais vraiment intéressé à la question sociale : son “affaire”, c’est surtout d’adapter le pays à la mondialisation. Par conséquent, on est dans une phase libérale au sens économique du terme. La droite fait sauter tous les verrous qui bloquent l’adaptation de notre vieux pays à la mondialisation : on ferme des classes, on supprime des postes de travail, des petits hôpitaux, des casernes, des postes de magistrats, etc.... La droite française est aujourd’hui championne du monde de la “suppression”. Mais, du coup, Besancenot peut occuper confortablement un créneau, créneau complètement “délirant” mais qui sait animer avec succès toutes les tribunes : sa côte de popularité dans les sondages ne cesse de progresser. Personne n’y croit sincèrement, mais “çà marche” et c’est identifiable. Et, entre les deux, le P.S. se retrouve “le cul entre deux chaises”. C’est ce que j’appelle l’impasse.

Le P.S. fait penser à ces livres qu’on place sur une cheminée : il faut de part et d'autre deux petits éléphants en bronze pour les faire tenir debout, sinon ils se barrent. Pour le P.S., ces deux éléphants sont, d’un côté, Besancenot, et de l’autre côté la droite. Pour Besancenot, le P.S. est à droite ; pour la droite il est à gauche. Et le P.S. va donc devoir aligner ses contributions dans ce contexte si étroit : mais on sait déjà que nul, après le congrès, ne s’en préoccupera plus du tout.

Par contre, si le P.S. succombait à la tentation des alliances, même avec le Mouvement Démocrate de Bayrou, je pense que son avenir s’assombrirait encore davantage. Et quant à une alliance avec Besancenot, ce serait une totale aberration : impensable!

Pourtant ce genre de personnages (par exemple Besancenot) - parfois fort sympathiques quand ils cachent leurs dents - ont toujours recueilli un certain succès en France : la bourgeoisie française, et les milieux “branchés”, ont toujours raffolé de se trouver face à ces sortes “d’épouvantails à moineaux” (on se souvient encore du truculent Marchais) qui “décoiffent”, ou font de la politique “autrement”.

Mais, évidemment, au moment de voter, tout cela s’effondrait....

Étrange paradoxe donc que ce parti - le P.S. - qui est abandonné de tous, sauf du public qui ne lui fait plus gagner que des "petites" élections locales (municipales, régionales, etc....) et lui fait perdre les “grandes” (présidentielles). Le P.S. ne parvient donc plus à avoir un véritable leadership national, mais il en garde encore un local bien établi dans les profondeurs de son électorat.

Le P.S. a donc un vrai problème politique : il n’a personne pour incarner un nécessaire et réel réformisme, un Rocard ou un Strauss-Kahn de nouvelle génération. Il a aussi un problème identitaire.

le P.S. se doit donc, désormais, de trouver sa vérité en lui-même : en a-t-il la capacité ? Là est la question.

Georges DELIESSE 

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